lundi 12 mars 2018

Ne sabordez pas notre laicité !

Lettre ouverte aux députés-es de l’Assemblée nationale
(...) Ce qui distingue ces voiles, c’est la longueur du tissu et leur degré d’envahissement de la dignité des femmes. La présence du hijab parmi les députés-es d’une assemblée nationale qui se veut laïque n’est pas souhaitable. Pas plus que le crucifix juché en haut de la chaise du président. (...).
Nous vous écrivons parce qu’il nous est difficile de détecter la cohérence des député-es de l’Assemblée nationale, tous partis confondus, à propos de la décision récente du Directeur général des élections du Québec (DGEQ) de changer les exigences d’authentification pour la photo de mise en candidature aux fins d’une élection.
En 2013, lors des audiences sur le projet de loi 60, les député-es de toute allégeance expliquaient qu’il fallait leur laisser le soin de trancher sur la question du port de signes religieux par les élus, député-es et ministres.
On nous expliquait qu’il appartiendrait au Bureau de l’Assemblée nationale de statuer sur cette question, le ministre responsable du gouvernement du Parti québécois se disant alors en faveur de l’interdiction de ces signes. Où logent maintenant les différents partis de l’Assemblée nationale ? Nous sommes préoccupé-es.

Le 20 février dernier, le DGEQ a annoncé en commission parlementaire qu’il avait annulé dans la réglementation électorale l’obligation de fournir une photographie à « tête découverte » dans le Règlement sur la déclaration de candidature, comme stipulé depuis 1989. Désormais, on n’exigera que l’obligation d’avoir « le visage découvert ».
La nouvelle mesure, s’inspirant de la loi 62, interdit le seul voile intégral (le niqab ou la burqa en l’occurrence), mais autorise en retour le port de signes religieux tels que le hijab, le turban sikh ou la kippa juive.
On est pourtant ici dans un processus formel du système électoral. Une mise en candidature dans une élection n’est pas une promenade dans un parc ! Selon nous, cette nouvelle directive mine, d’un trait de plume, le long cheminement vers la laïcité de l’État et des institutions politiques au Québec, dont son système électoral et sa gouvernance.
Nous nous adressons à vous, député-es de l’Assemblée nationale, puisqu’aucune et aucun d’entre vous ne s’est offusqué-e ni opposé-e à cette modification. Nous sommes étonné-es, consterné-es et extrêmement déçu-es que vous cédiez devant les réclamations de certaines franges religieuses intégristes. Car c’est bien de ça qu’il s’agit.
Le port de signes religieux ostentatoires n’est pas en soi la manifestation d’une plus grande piété ni d’un plus grand recueillement. Il est l’expression d’un prosélytisme social et politique et agit comme de véritables panneaux publicitaires.
Ce sont d’ailleurs les mouvances intégristes de différentes religions qui se positionnent à l’avant-poste de demandes incessantes d’accommodements religieux dans les organismes publics et qui sapent, par le fait même, le principe d’universalité dans l’exercice des droits et responsabilités citoyennes.
Ces mêmes mouvements, en réclamant le droit des agents de l’État d’arborer des signes religieux ostentatoires, heurtent la liberté de conscience des citoyens qui se font imposer ces marqueurs idéologiques.
Cette décision du DGEQ est tout à fait contraire à celle prise à l’unanimité par l’Assemblée nationale en 2011 interdisant aux sikhs d’entrer dans l’enceinte de l’Assemblée nationale en arborant leur kirpan, décision prise au nom de la sécurité, mais aussi pour le maintien du caractère de neutralité de l’État. Elle fut d’abord avalisée par la Cour supérieure en 2015 et subséquemment par la Cour d’appel du Québec, le 19 février dernier.
Aujourd’hui, votre acceptation sans mot dire de la décision du DGEQ équivaut à une autorisation du port de signes religieux par des député-es et ministres au Québec. Elle est contraire à la préservation du caractère laïque de l’État.
Une fois le hijab, le turban ou la kippa autorisés sur une photo de candidature, comment pourrait-on ensuite interdire à quiconque, une fois élu-e, d’afficher ses signes religieux, même une grosse croix catholique ?
Comment le gouvernement pourra-t-il, dans le processus officiel de sélection des immigrants et immigrantes, continuer à faire signer par les nouveaux arrivants la Déclaration sur les valeurs communes qui les somme de reconnaître que « l’État et les institutions sont laïques », alors même que les député-es ne sont pas capables de protéger le caractère laïque de l’Assemblée nationale ?
Comment se fait-il qu’il n’y ait eu aucun débat sérieux sur ce changement dans le Règlement de déclaration de candidature, en apparence anodin, mais fondamental par essence ?
Le multiculturalisme, vecteur de l’incursion de pratiques et de signes religieux dans les institutions publiques, est néfaste pour la démocratie, l’intégration des immigrants, ainsi que l’égalité entre les hommes et les femmes.
Le hijab reste un symbole de ségrégation envers les femmes, tout comme le niqab et la burqa.
Ce qui distingue ces voiles, c’est la longueur du tissu et leur degré d’envahissement de la dignité des femmes. La présence du hijab parmi les députés-es d’une assemblée nationale qui se veut laïque n’est pas souhaitable. Pas plus que le crucifix juché en haut de la chaise du président.
L’interculturalisme québécois se métamorphose immanquablement en une forme hybride du multiculturalisme s’il n’est pas rattaché à une ferme laïcité. Une diversité saine et enrichissante ne sera possible que dans le respect d’une laïcité
Nous, signataires, demandons donc que la question du port de signes religieux par les député-es de l’Assemblée nationale soit l’objet d’un débat en commission parlementaire, avec tenue d’audiences publiques.
Nous refusons que ce litige soit tranché par le seul Bureau de l’Assemblée nationale, lui-même soumis aux aléas de la lutte partisane et des alternances de gouvernement.
Nous demandons qu’un considérant soit ajouté à la Loi sur l’Assemblée nationale, dans son préambule, spécifiant que celle-ci est une assemblée laïque dénuée de tous signes ou symboles religieux, et que la section traitant de la déclaration de candidature stipule l’obligation de fournir une photographie « à tête découverte ».

Signataires :
André Lamoureux, politologue-UQAM, Rassemblement pour la laïcité
Nadia El Mabrouk, professeure, Université de Montréal
Djemila Benhabib, Prix international de la laïcité 2012
Diane Guilbault, présidente, Pour les droits des femmes du Québec (PDFQ)
Leila Lesbet, Association québécoise des Nord-Africains pour la laïcité (AQNAL)
Michèle Sirois, anthropologue, conseillère PDF Québec
Zahra Boukersi, enseignante
Yves Laframboise et Francine Lavoie, Laïcité capitale nationale
Lise Boivin, coordonnatrice, Collectif Laïcité de Québec solidaire
Léon Ouaknine, essayiste
Jacques Beauchemin, professeur émérite / sociologie, UQAM
David Rand, président, Libres penseurs athées
Simon-Pierre Savard-Tremblay, essayiste
Ali Kaidi, membre fondateur d’AQNAL
Ferid Chikhi, membre fondateur d’AQNAL
Leila Bensalem, enseignante
Jean-Paul Lahaie, Syndicalistes et progressistes pour un Québec libre (SPQ-L)
René Tinawi, professeur émérite, Polytechnique Montréal
Mohand Abdelli, ingénieur à la retraite
Dre Andrée Yanacopoulo, membre de PDF Québec
Pr. Micheline Labelle Professeur émérite de sociologie UQAM
Aziz Fares, journaliste
Shirley Christensen Côté

André Lamoureux,
Politologue-UQAM,
Porte-parole des signataires de cette lettre ouverte.

lundi 26 février 2018

Lettre ouverte des Algériennes à la presse Française

Nous sommes citoyennes Algériennes...
La page Facebook les Algériennes dont nous sommes les administrateurs, femmes et hommes vivants en Algérie, militons contre l'obscurantisme religieux qui ostracise les femmes, pour la laïcité, pour l’égalité entre les hommes et les femmes, pour que la société Algérienne puisse avoir son siècle des lumières, qu’elle puisse un jour vivre libre de ses pensées et de ses croyances. 
Nous ne sommes pas une page féministe, nous souhaitons que vivent en harmonie les hommes et les femmes, que chacun avance avec l’autre et construise un futur apaisé pour nos enfants afin qu’ils puissent un jour être fiers de leur Algérianité. Nous ne sommes pas arabes, nous sommes citoyennes Algériens, notre identité est Algérienne, notre culture est Algérienne et non arabe. 
Il ne s’agit point ici de revendications racistes, mais d’un refus d’assimilation à une culture qui n’est pas la nôtre, au refus de voir disparaître notre patrimoine culturel, au refus de voir dissoudre notre identité.
Si les Français refusent d’être sarrasins, souffrez que nous ayons la même volonté.
Nous sommes apostrophés chaque jour par ce discours islamiste mou dans la société française, qui lui seul semble avoir une tribune permanente dans la presse.
Nous avons été profondément heurtés dans nos consciences lorsque nous avons pu lire au matin qu’une ancienne Ministre de la République Française, laïque et démocratique, finissait de victimiser
une jeune fille voilée et exclue d’une émission de radio crochet pour des propos islamistes.
Oui, ses propos sont des propos issus de l’islam radical dont nous subissons les conséquences chaque jour dans nos chaires et nos consciences.
Madame Taubira qui par le passé n’a pas hésité à enterrer les ravages de la traite arabo-musulmane en Afrique noire, n’hésite pas aujourd’hui à flatter les islamistes qui aujourd’hui vont avoir un outil marketing incomparable, puisque la jeune fille en question va produire un album dont la promotion s’appuiera sur l’islamophobie.

Nous sommes de religion musulmane, nous sommes contre l’islamisme, serons-nous aussi traités d’islamophobe ? Nous rejetons immédiatement le discours hypocrite du c’est pas ça l’islam.
Si l’islam prôné par les salafistes c’est aussi l’islam, c’est un islam qu’il faut bannir, châtier, anéantir.
Ceux qui parlent d'islamophobie sont en premier lieu les islamistes, racistes, xénophobes, qui n’ont que pour conscience la haine de l’autre, l’animalisation de la femme, objet sexuel doté de la plus grande lubricité, qui faut voiler, faire taire, violer, humilier.

Chaque jour nous recevons des messages de détresse, de femmes battues toute la nuit, qui vont au commissariat, qui les renvoie avec leur détresse au tribunal qui tranchera en faveur de l’homme. Nous recevons régulièrement des messages de jeunes femmes dont certaines parlent de se suicider parce qu’elles ont perdu leur hymen hors mariage. 
Des femmes se font insulter parce qu’elles ne portent pas le voile, certaines sont menacées de mort par leur propre famille si elles ne portent pas le voile, d’autres sont violées parce qu’elles ne portent pas le voile. Les femmes violées sont obligées de se marier avec leur bourreau, des mineurs sont mariées de force.
Les athées sont pourchassés, les dissidents de la pensée radicale sont inquiétés par la police. Ceci est la réalité de la vie quotidienne des Algériens, et de tout ceci vous n’en faite jamais état, non vous victimisez les porteurs de messages islamistes, vous leur offrez de larges tribunes.
Comment le pays des droits de l’homme peut-il traiter Tariq Ramadan d’intellectuel ? Est-ce à dire que vous asseyez Tariq Ramandan aux côtés de Rousseau, Bergson, Arendt.
Non, ceci ne peut être supportable, Tariq Ramadan est un frère musulman, il prône un islam radical, il fait de la femme un animal, des autres croyances des animaux qu’il faut égorger, il est notre bourreau, et votre souhait est que nous adoubions notre bourreau, que nous le considérions comme un intellectuel sans malices qui porte la bonne parole.

Nous sommes Kaméliens
Kamel Daoud EST un intellectuel, nous sommes Kaméliens dans l’âme, nous refusons cette arabité que l’on nous fait subir, nous refusons cet intégrisme religieux qui nous opprime, nous tue, nous viole nos consciences et nos corps.
Nous qui avons subi la décennie noire, qui avons vu nos frères se faire massacrer par les islamistes,
nous ne pouvons supporter de voir nos bourreaux d’hier se pavaner et glouglouter sans cesse dans la presse sans qu’il n’y ait un débat contradictoire.
Notre page qui comptait plus 500 000 vues, 60 000 abonnés a été supprimée par Facebook sous la pression répétée des islamistes. D’autres pages créées par des femmes ont connu le même sort. Qui a évoqué un jour cette censure ? Personne.
Que l’on censure des gens qui prône la laïcité, le respect, qui se positionne contre les islamistes n’intéresse personne.
Mais tout le monde s’insurge que l’on exclue d’une émission une jeune femme qui porte un discours radical. S’il existe des musulmans laïques, qui prônent une pratique de la religion qui doit rester dans l’intime. 
S’il y a des Algériens profondément laïques, des athées, des chrétiens, des juifs, des agnostiques qui veulent vivre ensemble et en paix, et laisser le fait religieux à l’entrée de leur demeure.
S’il y a des croyants qui respectent les femmes, qui sont contre le voile, pour l’égalité entre les hommes et les femmes, qui sont respectueux des autres, profondément pacifistes, qui ne passe pas leur temps à regarder en arrière, qui sont choqués et bouleversés qu’un pays détruise des écoles pour construire des mosquées.
Nous voulons aussi que ces voix soient portées, nous souhaitons aussi qu’ils aient leur tribune, nous souhaitons aussi qu’ils apparaissent dans les débats publics.  En leur donnant la parole, en leur laissant la possibilité d’exprimer leur pensées, leurs souhaits, vous verrez que vous couperez les arguments des extrémistes politiques, car oui, des algériens sont intégrés dans d’autres pays, et sont profondément meurtris dans leur âme quand ils voient les bourreaux qu’ils ont fui hier, passer de média en média pour répandre leur haine.

Les Algériennes

Facebook : @touteslesalgériennes

mercredi 14 février 2018

Je suis laïque…

Pourquoi j’ai signé l’appel ? Parce que je suis laïque.

Et Pourquoi je suis laïque et comment je suis laïque ?

La question n’est pas simple. Et pourtant la réponse n’est pas compliquée.
Je suis laïque parce que j’ai vu de très près, dans les années 1980 et 1990, les ravages que provoque la religion lorsqu’elle sert de combustible à une occupation totalitaire du terrain politique.
Je suis laïque parce que j’ai vu des jeunes en déshérence manipulés par des sergents recruteurs, les poches pleines de dollars des pétromonarchies wahhabites, devenir des machines à tuer au nom d’une épuration morale basée sur un usage hermétique et exclusif du fait religieux.
Je suis laïque parce que j’ai vu, en Algérie et dans de nombreux pays où l’islam est religion d’Etat, des politiques, des dirigeants jouer avec le feu de la religion avant de se faire ingérer, et devenir eux-mêmes les plus dangereux des pyromanes. 
Je suis laïque par fidélité à la mémoire et au combat de mes amis victimes de l’islamisme, j’allais dire des islamismes, car je pense à l’islamisme réel, visible, et à l’islamisme masqué, celui-là-même que certains gouvernements utilisent pour se débarrasser de certains de ses opposants. 
Je suis laïque non pas par posture intellectuelle mais parce que, né « musulman sociologique » pour reprendre l’expression de Maxime Rodinson, je veux être défini à partir de mon appartenance et de mon engagement citoyen. 
Je suis laïque, en fait, parce que je ne veux être caractérisé ni par ma religion, ni par mes origines ethniques.
Je suis laïque parce que j’ai envie d’être libre dans l’expression de mes opinions et que si je respecte le sacré, il n’y a cependant aucune raison pour que je l’adore. 
Je suis laïque par goût de la liberté, celle des autres, la mienne. Toutes les libertés : démocratique, citoyenne, d’expression, de confession. 
Je suis laïque car, quand je suis arrivé en France en 1993 chassé de chez moi
précisément par l’islamisme, j’ai été outré de voir que la République de la loi de 1905 offrait alors plus et mieux d’asile aux islamistes venus recharger leurs accus après leurs crimes, qu’aux laïques, leurs victimes.
Je suis laïque parce que je n’ai jamais compris pourquoi certains de mes amis de gauche, en France, me disaient en toute bonne foi, sans mauvais jeux de mot, que la laïcité hors de France était un pâle mimétisme. Et que par conséquent, au nom d’un relativisme culturel fatal, il nous fallait en Algérie accepter une république islamiste. 
Je suis laïque parce que je ne veux pas qu’en raison de mon prénom et de mon patronyme-à-consonance, on me somme, chaque fois que le terrorisme frappe, de dénoncer les extrémistes islamistes. Comme si du seul fait que je m’appelle Arezki, je suis comptable de l’islam, de l’islamisme, du terrorisme…
Je suis laïque parce qu’un jour, dans une réception avec mes amis de gauche, j’ai refusé de prendre un verre de vin parce que j’avais sans doute trop bu la veille, on me décoche la flèche essentialisante : « Tu ne bois pas à cause de l’Islam ? ».
Je suis laïque parce que je ne veux pas que se reproduise l’incident qui est arrivé à un de mes amis, qui porte lui aussi un nom-à- consonance et qui a le fasciés qui va avec, qui, un jour de ramadan, a été menacé par des jeunes à Montreuil parce qu’il avait un sandwich a la main…
Je suis laïque parce que je ne veux pas être assigné a une identité essentialisée, et péjorée, ni ici ni ailleurs et où que je sois, je voudrais être un citoyen, et rien qu’un citoyen, sans aucun complément d’objet direct ou indirect…
Je suis laïque car, ici, mon patronyme laisse penser forcément que je suis trop musulman et que ce n’est pas bien et qu’en Algérie je ne le suis pas assez et c’est pire…
Je suis laïque parce que, militant dans une association laïque, je suis dubitatif de voir qu’on nous prive de subventions et qu’on se précipite pour cajoler a coups de largesses électoralistes des associations qui ne cachent pas leur contenu communautariste et religieux.
Je suis laïque parce qu’une nation, une société, ne se définit pas par des croyances religieuses mais par un projet commun et la volonté de vivre ensemble dans des règles claires qui respectent les droits de chacun et impose les mêmes devoirs a tous.
Je suis laïque car je constate, sans aucune difficulté, que ce sont les milieux les plus socialement défavorisés qui sont exposés à subir les injustices sociales mais aussi à l’exploitation des frustrations sociales les Vendeurs de Paradis. 
Je suis laïque parce que … Je peux continuer comme ça longtemps….
Je suis laïque tout simplement parce que je suis pour la justice sociale et que sans la laïcité, elle ne peut pas s’accomplir. 
Arezki Metref
Courtoisie de l’auteur.
Paris, samedi 10 février 2018.

vendredi 26 janvier 2018

Denise Bombardier

Il faut le répéter. La majorité des Québécois musulmans ne fréquentent pas la mosquée. La majorité des femmes musulmanes ne portent pas le voile. Et il existe au Québec une association de Nord-Africains musulmans pour la laïcité.
Ces centaines de milliers de musulmans n’ont qu’un but dans la vie : s’intégrer au Québec. Ils sont venus chez nous pour respirer la liberté et pour échapper souvent aux barbus fondamentalistes de leur pays d’origine. On pourrait dire d’eux qu’ils appartiennent à la majorité silencieuse musulmane.
Ils gardent profil bas, mais ceux qui appartiennent à cette association qui défend la laïcité, par exemple, font constamment l’objet de dénonciations. Comme ce qui arrive aux Québécois de souche, ils sont accusés d’islamophobie. Hier, Le Devoir a publié un texte de musulmans qui se réclament des valeurs rassembleuses du Québec et dénoncent ceux qui, enfermés dans leur identité religieuse, sont les prosélytes d’un islamisme provocant, intolérant et mortifère.
Culpabilité
On doit refuser de se faire bâillonner par les fondamentalistes qui ont compris que trop de Québécois sont naïfs et facilement culpabilisés. Ils utilisent des arguments enflammés pour décrire un Québec islamophobe.
Ces fous de Dieu déploient leurs tentacules jusque dans les antichambres des cabinets ministériels, dont celui d’abord du premier ministre Couillard. Car ces défenseurs de l’islam fondamentaliste ont réussi dans un premier temps à impressionner le chef du gouvernement. Ce dernier semble maintenant faire marche arrière en abandonnant leur proposition de faire du 29 janvier une journée officielle contre l’islamophobie.
La commémoration lundi prochain de la tragédie de la mosquée de Québec où 6 musulmans ont été tués et 8 autres blessés par Alexandre Bissonnette, un Québécois de souche, ne peut en aucune façon permettre à des combattants islamistes d’offenser tout un peuple.
Compassion
Ce peuple, d’ailleurs, qui s’est conduit avec tant de douleur contenue et exprimant une indignation devant ces actes de barbarie et de la compassion à l’endroit des compatriotes musulmans, a été bafoué. Dans leur texte d’hier, les auteurs affirment ceci : « C’est bien plus d’un islam ostentatoire et politisé et de doléances d’une prétendue communauté musulmane qu’il a été question. » Ils se réfèrent ainsi aux funérailles officielles de 2017 détournées en quelque sorte, et ce, avec la connivence des autorités gouvernementales, par des imams promoteurs d’un certain islam qui pose problème.
Ce sont les mêmes imams, on le suppose, qui ont convaincu le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence d’organiser un colloque ces jours-ci sur le « vivre ensemble » en invitant des « experts » algériens pour nous prêcher la bonne nouvelle islamiste en hommage supposé aux victimes du 29 janvier. N’oublions pas que l’Algérie peine à contrôler le courant salafiste qui imprègne la société algérienne tout entière. Et il faut ajouter que le colloque a reçu la bénédiction du gouvernement canadien. Le communautarisme de Justin Trudeau est apprécié­­­ des fondamentalistes islamiques. C’est bien connu.
Ce n’est pas avec cette commémoration bruyante et déplacée que les victimes du 29 janvier vont reposer en paix. Les Québécois non plus, d’ailleurs.
Denise Bombardier

http://www.journaldemontreal.com/2018/01/26/les-quebecois-musulmans

jeudi 25 janvier 2018

Un an après l'attentat de la mosquée de Québec, apaiser le climat social


Un détournement inacceptable
Depuis l’odieux attentat survenu il y a un an à la mosquée de Québec, quelque chose s’est brisé dans le tissu social. Dès le lendemain du meurtre, des publications diffamatoires affichant des personnalités du Québec les mains tachées de sang circulent sur Internet, et des accusations à peine voilées associent l’attentat aux partisans de la laïcité. Les Québécois sont accusés de racisme et d’islamophobie sur toutes les tribunes, et une consultation sur le racisme et la discrimination est annoncée par le gouvernement quelques mois plus tard.
Ce festival des amalgames n’a fait que polluer le climat social, polariser le débat et alimenter l’hostilité envers l’islam et les musulmans. Rappelons que l’enquête est toujours en cours et que personne n’en connaît l’issue.
Un an après, un temps d’arrêt est plus que nécessaire afin de soutenir les veuves, les orphelins, les proches des défunts, et de rendre un dernier hommage, dans le recueillement et la sérénité, à nos concitoyens Ibrahim Barry, Mamadou Tanou Barry, Khaled Belkacemi, Abdelkrim Hassane, Azzeddine Soufiane et Aboubaker Thabti.
Occasion de rapprochement
Un tel moment de recueillement peut être une excellente occasion de rapprochement entre Québécoises et Québécois de toutes origines. Mais cela ne peut se faire que si l’on mise sur des valeurs citoyennes rassembleuses, et non pas sur des identités religieuses réductrices et polarisantes.
Malheureusement, l’instrumentalisation de la tragédie à des fins idéologiques et de promotion d’un certain islam n’a échappé à personne, et ce, dès le lendemain de la tuerie. Zahra Boukersi, proche parente d’Abdelkrim Hassane, victime de l’attentat, dénonce la mainmise d’imams et d’intervenants communautaires sur l’organisation de la cérémonie officielle des funérailles.
Beaucoup de musulmans ne se sont pas reconnus dans cette cérémonie loin des traditions et de la sobriété qu’impose leur religion dans de telles circonstances. En guise d’oraison funéraire et d’hommage aux victimes, c’est bien plus d’un islam ostentatoire et politisé et de doléances d’une prétendue communauté musulmane qu’il a été question.
Et c’est bien d’islam et d’islamophobie que l’on s’apprête à nous entretenir un an plus tard. Dans le cadre des commémorations, le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence (CPRMV) organise un colloque intitulé « Pour le vivre-ensemble avec nos différences » qui rassemble principalement des intervenants d’associations à référent islamique. « Nous allons discuter sur ce qu’est l’islam », selon les mots mêmes de Boufeldja Benabdallah, cofondateur du Centre culturel islamique de Québec.
Et pour parler d’islam, le colloque donnera la parole, en particulier, à des « spécialistes » recommandés par l’ambassade du Canada en Algérie. Quel message veut-on lancer à la société québécoise en envoyant des experts venus d’un pays étranger ? D’autant plus que l’Algérie, dont le gouvernement ne parvient pas à endiguer la salafisation de sa société, n’est pas une référence en matière de vivre-ensemble.
Et comment ne pas se questionner sur les méthodes du CPRMV, qui privilégie la parole de religieux plutôt que celle d’organisations citoyennes représentatives des différents groupes sociaux du Québec, pour favoriser le vivre-ensemble ?
Les dérapages d’un discours normatif
Tout au long de l’année, des imams et des « leaders » autoproclamés des musulmans ont contribué à cristalliser une image provocatrice de l’islam. Le comble de la provocation a été la campagne menée contre l’article de loi réglementant l’offre et la prestation de service à visage découvert (article 10 du PL62).
Le Conseil national des musulmans canadiens (CNMC), celui-là même qui réclame l’instauration d’une journée officielle contre l’islamophobie, porte plainte contre le gouvernement du Québec pour réclamer le droit de porter le niqab en tout temps. Pourtant, ce symbole de réclusion des femmes est bien plus lié à l’idéologie salafiste qu’il est un signe religieux, étant même interdit lors du pèlerinage à la Mecque.
S’alliant au mouvement de contestation, des intellectuels et des groupes d’une certaine gauche montent aux barricades pour accuser d’islamophobie tous ceux qui s’expriment contre le niqab, et plus largement contre tous ceux qui soutiennent la laïcité au Québec et résistent à l’ingérence des règles religieuses dans notre société.
Nous sommes outrés que des élites de la société, des universitaires, des intellectuels participent à jeter l’anathème sur des citoyens. Nous-mêmes, Québécoises et Québécois de culture musulmane qui ne correspondent pas à leur vision transmise de l’islam, sommes accusés d’islamophobie.
Ces personnes éduquées sont-elles conscientes qu’en Égypte, en Algérie et dans bien des pays musulmans dont les populations ont souffert et souffrent encore des exactions islamistes, des personnes sont persécutées pour des accusations d’offense à la religion et d’apostasie ? Ces intellectuels, en accusant des musulmans du Québec d’islamophobie, usent d’intimidation à leur égard et les mettent en danger, eux et leurs familles restées au pays.

Il est temps de mettre fin à ce tapage dangereux en évitant d’exacerber des tensions qui n’ont pas lieu d’être. La dernière chose dont nous avons besoin au Québec, c’est de sermons sur l’islam et l’islamophobie. Dans ce contexte, nous saluons la sage décision des premiers ministres du Canada et du Québec de ne pas donner suite à la demande d’une journée contre l’islamophobie et de privilégier une journée de commémoration et de recueillement à la mémoire des victimes. Ce n’est pas à travers des appartenances religieuses, mais bien en tant que citoyens attachés au Québec que nous pouvons favoriser le rapprochement et la cohésion sociale.
Ferid Chikhi,
Nadia El-Mabrouk
Ali Kaidi
Leila Lesbet
Association québécoise des Nord-Africains pour la laïcité (AQNAL)  
http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/518399/attentat-a-la-mosquee-de-quebec-un-an-apres-apaiser-le-climat-social       

mardi 16 janvier 2018

Pourquoi pas une journée nationale contre l’islamisme ?


Si les représentants des organisations à référent islamique sont vraiment dans une démarche dépourvue de postures politiques et idéologiques pourquoi ont-ils alors choisi le mot islamophobie, un mot polémique qui divise l’opinion publique et fait aujourd’hui l’objet d’emplois multiples ?

Il est incontestable que ce mot cache des postures idéologiques ; il fait partie de la rhétorique des islamistes de toutes obédiences en Occident

En réaction au refus du PQ et de la CAC de la journée contre l’islamophobie revendiquée par des organisations habituées à exploiter la religion à des fins politiques, le vice-président du Centre culturel islamique de Québec (CCIQ), Boufeldja Benabdallah, dit qu’il « trouve ça dommage qu’on n’ait pas saisi cette occasion pour unir les gens ».

Certes, pratiquement tous les Québécois ont condamné la tuerie de la Grande Mosquée de Québec qui a entraîné la mort de six musulmans, mais faire de ce sentiment un fonds de commerce et jouer sur les émotions pour instituer un discours de victimisation cher aux islamistes est une démarche regrettable de la part de personnes qui se sont proclamées représentants, sans personne ne les mandate, d’une communauté musulmane davantage fictive que réelle et parler publiquement en son nom.

Cet événement pour eux est une « occasion », une opportunité parmi d’autres qu’il faut exploiter pour normaliser leur discours de victimisation et faciliter la tâche aux islamistes afin d’avancer dans leur combat.

 Si les représentants des organisations à référent islamique sont vraiment dans une démarche dépourvue de postures politiques et idéologiques pourquoi ont-ils alors choisi le mot islamophobie, un mot polémique qui divise l’opinion publique et fait aujourd’hui l’objet d’emplois multiples ?

Il est incontestable que ce mot cache des postures idéologiques ; il fait partie de la rhétorique des islamistes de toutes obédiences en Occident. C’est un mot qui justifie la présence du discours islamiste à tous les niveaux de la société et donne de la légitimité à certaines personnes et à certains groupes de parler au nom de tous les musulmans.

En fait, ce mot ne fait pas référence seulement aux propos haineux incitant à la violence et aux actions violentes contre les musulmans, mais aussi à toutes tentative de critiquer et de rejeter le discours islamiste qui est à l’origine de beaucoup de violence dans le monde.

Ce concept est utilisé pour qualifier non pas la crainte d’une personne musulmane, mais d’une idée et d’un discours, l’islam en l’occurrence. Ce concept est véhiculé par le discours des islamistes pour faire taire et museler les personnes qui osent de l’intérieur de leur univers culturel les critiquer à défaut de les accuser d’apostasie et de les condamner à mort.

Le mot racisme ou discrimination suffit pour parler de la haine et de la violence ciblant une catégorie de citoyens à cause de leur appartenance religieuse. Pourquoi en imposer un mot chargé d’idéologie et revendiqué par des personnes qui font sciemment confusion entre islam et islamisme ?

En principe, ces soi-disant représentants de la communauté musulmane qui montent en créneaux à chaque fois qu’un attentat islamiste est perpétré un peu partout dans le monde pour nous faire une leçon de pédagogie concernant l’amalgame entre islam et islamisme et qui par ailleurs prétendent être contre la haine et la violence, revendiquent  une journée nationale, voire internationale, contre l’islamisme, pour se démarquer définitivement de cette idéologie meurtrière,  au lieu de s’enfoncer dans la justification du discours islamiste avec ce mot polémique :« islamophobie ».

Ali Kaidi

Philosophe

samedi 6 janvier 2018


Valorisation de la diversité et

Lutte contre la discrimination

Novembre 2017

MÉMOIRE 

Collectif de citoyennes et citoyens québécois

Originaires de pays musulmans

Endossé par : L’Association Québécoise des Nord Africains pour la Laïcité ---  (AQNAL)[1]

Nous sommes un collectif de citoyennes et citoyens québécois originaires de pays musulmans qui ne voulons pas être identifiés par notre appartenance religieuse, et désirons une réelle intégration basée sur
les valeurs laïques et démocratiques du Québec.

Nous considérons que la protection des minorités ne passe pas par
la protection de la religion mais par l’insertion socio-professionnelle.  

1.   Introduction



En tant que citoyennes et citoyens québécois de culture musulmane, attachés aux valeurs de liberté, d‘égalité et de démocratie de notre pays d’accueil, nous voulons apporter notre contribution à ce Forum sur la valorisation de la diversité et la lutte contre la discrimination.
Nous saluons l’initiative gouvernementale de s’atteler à trouver des solutions concrètes et durables à la discrimination et aux problèmes de chômage qui touchent un grand nombre de nos concitoyens. Les immigrants sont sélectionnés par le Québec pour leur capacité à contribuer à l’essor économique, social et culturel du Québec, et il est important de valoriser la diversité des talents, des œuvres, des compétences et des qualifications que ces nouveaux citoyens Québécois[1] apportent dans leurs bagages. 

Dans ce mémoire, nous commençons par exposer différentes raisons qui, à notre avis, représentent des entraves importantes à l’intégration socioculturelle et à l’insertion socioprofessionnelle des nouveaux arrivants provenant de pays musulmans. Nous énonçons ensuite nos recommandations afin d’éviter ces difficultés, et exposons des solutions structurantes et durables permettant de favoriser la pleine participation des Québécoises et des Québécois issus de l’immigration.
Nous déplorons que l’ethnicité et la religion aient pris une place dominante au Québec ces dernières années dans le discours sur la diversité et sur l’intégration des minorités. Ce discours est entretenu par certains représentants associatifs qui « racialisent » les rapports sociaux en pointant les « Blancs » comme dominants, et tous les autres comme « racisés », soit des victimes du racisme et de la « suprématie blanche ». Pis encore, on a transformé la religion en « race ». Nous réfutons cette vision binaire du Québec, et nous déplorons d’être ainsi regroupés sous le même vocable de « racisés ».
De plus, en tant que citoyennes et citoyens Québécois provenant de pays musulmans, nous sommes très souvent associés à une « communauté musulmane » représentée, de surcroît, par un islam dogmatique, revendicateur, qui heurte les principes de laïcité du Québec. Cette situation représente une entrave majeure à notre intégration. Ainsi, en plus de l’effort considérable que représente l’intégration à une nouvelle société, nous devons également nous démener pour nous dissocier d’un islam fondamentaliste régressif, malheureusement mis de l’avant par les médias et certains élus politiques.

En effet, la désignation de « communauté musulmane » semble définitivement intégrée dans le discours politique et médiatique. Par exemple, depuis la fusillade à la mosquée de Québec, les reportages sur la « communauté musulmane» ont été multipliés, ainsi que des sondages interrogeant les Québécois sur leur tolérance à cette communauté[2]. 
Pour donner un exemple de discours politique valorisant cette assignation identitaire, à la suite de l’arrestation d’Amor Ftouhi, un Québécois qui a poignardé un policier au Michigan, le premier ministre Philippe Couillard a appelé la « communauté musulmane » à réagir. Bien que, comme l’explique bien Noomane Raboudi[3], il soit tout à fait justifié d’appeler à une réflexion à propos de l’idéologie islamiste totalitaire qui sous-tend les attentats commis au nom de l’islam, il est faux de dire que les musulmans du Québec forment une « communauté » homogène qui puisse s’exprimer d’une même voix.

Les Québécois désignés par « musulmans » proviennent de diverses parties du monde, sont associés à diverses tendances de l’islam, et ont des rapports très diversifiés avec la foi et les pratiques religieuses. Mais surtout, comme tous les citoyens, nous avons des opinions et des idées très diversifiées sur la société. Certains parmi nous s’expriment régulièrement et très fortement au sujet des dérives de l’islam politique, dont nous sommes plusieurs à avoir subi les affres dans nos pays d’origine. Pour cette raison, nous trouvons injuste que le Premier Ministre nous associe à une certaine « communauté musulmane » complaisante à l’endroit de l’islamisme.
Dans le cadre de ce Forum, nous tenons à attirer l’attention du gouvernement sur les effets pervers de cette assignation identitaire des citoyens en fonction de leur religion. Alors que les immigrants reçus au Québec sont généralement désignés par leur pays d’origine (on parle par exemple des communautés vietnamiennes, chiliennes ou des ressortissants français), comment se fait-il que les origines nationales des citoyens de culture musulmane s’effacent soudainement pour laisser place à leur seule identité religieuse ?
De plus, ce concept de « communauté musulmane » est un produit islamiste pur. Il ne faut jamais oublier que la construction de cette communauté imaginaire homogène, à partir d’un islam déshistoricisé et homogénéisant, est le pilier même du discours islamiste. Il est triste de constater qu’une partie de l’élite québécoise joue le jeu de l’islamisme en avalisant ce concept, sans se rendre compte qu’elle est en train d’être piégée par son discours auréolé de « pseudo droits humains ».


[1] Dans ce mémoire, le masculin englobe le féminin.
[2] « Des préjugés tenaces face à la communauté musulmane, selon un sondage », Radio Canada,13 mars 2017.
[3] « Couillard dit tout haut ce qu’une majorité de musulmans pensent tout bas », Noomane Raboudi, Le Devoir, 28 juin 2017

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